Secourir une personne en détresse n’est pas un crime !

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Nous nous sommes rendus à Neuchâtel, jeudi 25 octobre, pour manifester notre soutien au pasteur Norbert Valley devant le bâtiment où aurait dû se tenir une audience préliminaire à laquelle il avait été convoqué. Norbert Valley est menacé d’une amende de 1000 CHF pour avoir nourri et logé un Togolais en détresse menacé d’expulsion. L’audience a été reportée sans explications.

Mise à jour
Au bas de cet article:

  • Revue de presse
  • Discours de la présidente de S. Egidio Suisse

Sera-t-il prochainement interdit de venir en aide à un étranger en détresse s’il n’a pas d’autorisation de séjour en Suisse ? Sera-t-on implacablement amendé si l’on a donné à manger ou que l’on a procuré un lit à un requérant débouté se trouvant à la rue ? C’est pour dire ces craintes que nous nous sommes retrouvés à 8h45
devant le Ministère public (rue du Pommier 3a) à Neuchâtel le 25 octobre 2018.

Une septantaine de personnes ont fait le déplacement. Parmi elles, des représentants de différents groupes chrétiens (l’AGORA de Genève, le Groupe de Saint-François à Lausanne), de même que les associations Amnesty International et Droit de rester.

Présidente de S. Egidio Suisse, Anne-Catherine Reymond a rappelé publiquement de notre attachement à une justice à visage humain et remis à Norbert Valley une pétition de soutien à Norbert Valley, munie de 2600 signatures. Une pétition qui dit notre inquiétude face aux décisions que prend la justice en ce domaine. Nous craignons la mise en place d’une jurisprudence qui criminalise l’aide aux personnes en détresse et terrorise celui qui veut venir au secours de son prochain lorsqu’il a faim, soif, froid ou que son existence est menacée.


 

Arcinfo

Watson.ch


Secourir n’est pas un crime

Neuchâtel, 25 octobre 2018

Mesdames, Messieurs, chers amis,

Vous le lisez sur les banderoles autour de vous, où se trouvent notamment des citations de l’Evangile de Matthieu au chapitre 25: nous, la Communauté de Sant’Egidio, sommes très sensible à la place qui est faite au pauvre dans nos villes, dans nos quartiers. Et notamment celle qui est faite à l’étranger, au migrant, au sans-papier. (Ou encore aux roms qui risquent prochainement d’être chassés des trottoirs lausannois).

La tradition spirituelle qui est la nôtre, le christianisme, nous enseigne que Dieu a une affection particulière pour ceux qui vivent la fragilité, la faiblesse, la précarité. Jésus, par les gestes concrets d’affection qu’il a posé envers les pauvres, et par sa parole vigoureuse, nous demande d’aller vers celles et ceux qui souffrent, qui se débattent dans les tourments de la vie.

Martin Luther a condensé cet impératif dans une formule lumineuse : « Ne cherche pas Dieu au ciel. Tu ne l’y trouveras pas. Le ciel est devenu vide de lui. Cherche-le sur la terre où il se tient caché et crucifié. A ta porte. A côté de toi ». De nombreux saintes et saints de différentes traditions chrétiennes, avant nous, se sont dépensé sans compter pour accueillir l’étranger comme une sœur, comme un frère, et – tel le Bon Samaritain – l’accompagner sur un chemin semé d’embuches administratives, un Golgotha existentiel.

A sa modeste mesure, depuis les années 90, la Communauté de Sant’Egidio rejoint elle aussi à Lausanne des NEM, des sans-papiers, des déboutés. Elles les accompagne, par la prière, mais aussi par des gestes de solidarité, comme des cours de français ou des visites, ceux qui vivent la galère de la migration. Parfois aussi en donnant à manger ou en offrant un toit.

C’est donc avec inquiétude que nous découvrons la menace qui plane sur le pasteur Norbert Valley. Sera-t-il prochainement interdit de venir en aide à un étranger en détresse s’il n’a pas d’autorisation de séjour en Suisse ? Sera-t-on implacablement amendé si l’on a donné à manger ou que l’on a procuré un lit à un requérant débouté se trouvant à la rue ?

C’est la raison qui nous a poussé à organiser ce rassemblement, ce matin, pour manifester notre soutien au pasteur Norbert Valley et pour publiquement de notre attachement à une justice à visage humain dans notre pays.

Nous craignons la mise en place d’une jurisprudence qui criminalise l’aide aux personnes en détresse et terrorise celui qui veut venir au secours de son prochain lorsqu’il a faim, soif, froid ou que son existence est menacée.

Et nous appelons les instances compétentes, judiciaires ou politiques, à respecter l’acte de bonté humaine, notamment lorsqu’il est enraciné dans une conviction religieuse.

Anne-Catherine Reymond