Le pape veut que le Catéchisme condamne la peine de mort

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Le pape François a estimé que la doctrine exprimée par le Catéchisme de l’Église catholique n’est pas figée et doit pouvoir évoluer, notamment sur son admission de la peine de mort. (Article paru dans La Croix le 12.10.2017).

Discours du Le pape François devant le  Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation, au Vatican, le 11 octobre 2017. Tiziana FabI/AFP

 

Le pape François a sévèrement condamné, mercredi soir 11 octobre, la peine de mort « qui lèse lourdement la dignité humaine », appelant à ce que le Catéchisme de l’Église catholique en exclue catégoriquement le recours, quelles que soient les circonstances, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
 

« Il faut affirmer avec force que la condamnation à la peine de mort est une mesure inhumaine qui humilie, et d’une certaine façon vient persécuter la dignité humaine, a-t-il affirmé. Et, en soi, cela est contraire à l’Évangile car on décide volontairement de supprimer une vie humaine qui est toujours sacrée aux yeux du Créateur. »

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François s’exprimait devant les participants à la rencontre organisée par le Conseil pontifical pour la nouvelle évangélisation à l’occasion des 25 ans de la promulgation du Catéchisme de l’Église catholique.

La question « ne peut être réduite à un simple rappel historique »

L’occasion, pour le pape, de rappeler que, selon le Catéchisme, « la finalité de la doctrine et de l’enseignement doit être placée dans l’amour qui ne finit pas » et qu’« on doit toujours faire apparaître l’amour de Notre Seigneur afin que chacun comprenne que tout acte de vertu parfaitement chrétien n’a pas d’autre origine que l’amour et pas d’autre terme que l’amour » (§ 25).

En ce sens, le pape a estimé que le Catéchisme devait donner à la peine de mort « un espace plus adapté et cohérent à cette finalité expresse ». Il a jugé que « cette problématique ne peut être réduite à un simple rappel d’un enseignement historique sans faire émerger non seulement les progrès de la doctrine dans l’œuvre des derniers papes mais aussi la prise de conscience du peuple chrétien ».

« Aussi grave soit le crime commis, la peine de mort est inadmissible »

Butant sur le fait que, par le passé, des papes ont pu légitimer l’emploi de la peine de mort, le Catéchisme, même modifié sur ce point en 1998, permet en effet « le recours à la peine de mort, si celle-ci est l’unique moyen praticable pour protéger efficacement de l’injuste agresseur la vie d’êtres humains » (§2267).

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« Même dans les États pontificaux, on a eu recours à ce remède extrême et inhumain, négligeant le primat de la miséricorde sur la justice », reconnaît François. Le pape estime toutefois que condamner plus nettement la peine de mort ne présente « aucune contradiction avec l’enseignement du passé, parce que la défense de la dignité de la vie humaine du premier instant de sa conception à la mort naturelle a toujours trouvé dans l’enseignement de l’Église une voix cohérente et autorisée. »

« Il est donc nécessaire de répéter que, aussi grave soit le crime commis, la peine de mort est inadmissible par ce qu’elle attente à l’inviolabilité et à la dignité de la personne », affirme le pape, se référant à la doctrine de saint Vincent de Lérins sur le progrès de la doctrine.

« La Parole de Dieu ne peut être conservée dans la naphtaline »

François souligne en effet que « la Tradition est une réalité vive et que seule une vision partiale peut penser le “dépôt de la foi” comme quelque chose de statique ».

« La Parole de Dieu ne peut être conservée dans la naphtaline comme s’il s’agissait d’une vieille couverture à protéger contre les parasites », estime-t-il, la voyant comme « une réalité dynamique, toujours vive, qui progresse et croît parce qu’elle tend à un accomplissement que les hommes ne peuvent fermer ».

« On ne peut conserver la doctrine sans la faire progresser comme on ne peut la lier à une lecture rigide et immuable sans humilier l’action de l’Esprit Saint », a conclu le pape dans ce long développement, ici appliqué à la peine de mort, mais qui pourrait tout autant être appliqué à d’autres sujets brûlants de la doctrine.

Nicolas Senèze, à Rome