Ne pas interdire la mendicité

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Un mois après le lancement, en octobre 2016, du référendum contre l’interdiction de la mendicité dans le canton de Vaud, nous réitérons notre appel à renoncer à une mesure extrême qui menace les plus pauvres. Nous incitons les citoyens suisses domiciliés dans ce canton à le signer.

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Voici les arguments qui nous ont poussé à nous opposer à cette loi et à nous associer au comité référendaire. Ce dernier a jusqu’au 23 décembre pour réunir les 12’000 signatures requises pour que le canton soit obligé d’organiser une votation populaire sur le sujet.

 

Mendier n’est pas la solution. L’interdire? Encore moins!

Nous ne faisons en aucun cas la promotion de la mendicité. S. Egidio considère comme préférable la mise en place d’aides structurées d’accompagnement et d’assistance. Seuls ou avec d’autres, depuis plusieurs années, nous mettons en œuvre des programmes d’aide dans différents domaines, comme celui de la scolarisation des enfants roms.

Mais nous constatons que la complexité des situations dans lesquelles vivent les pauvres, les lacunes des législations sur l’aide sociale, les ressources limitées des organismes d’entraide et, parfois, le ping-pong entre collectivités publiques qui se rejettent la responsabilité de leur venir en aide, font de la mendicité le dernier recours.

Nous considérons que, tant que la société n’est pas équitable et n’offre pas une place digne à chacun, elle ne peut interdire la mendicité pratiquée par ses membres les plus vulnérables. On ne résout pas une problématique sociale par l’interdiction de cette dernière. Ne faisons pas de la mendicité un idéal. Mais n’en faisons pas non plus un interdit.

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Aider “là-bas”, ne pas donner ici? Trop simple!

Nous sommes conscients que, s’agissant des roms, la responsabilité d’autres pays est engagée. Notamment ceux dont ils sont ressortissants. Et que certains d’entre eux ont reçu des financements de la Suisse au titre de l’aide à l’intégration au sein de l’Union européenne. Mais que ceux-ci n’honorent pas forcément leurs engagement dans ce domaine.

Est-ce une raison pour interdire totalement aux roms une activité – légale jusqu’ici – au motif qu’ils auraient à faire valoir leurs droits face à leur pays d’origine? Nous ne pouvons accepter cette vision strictement juridique qui, dans le meilleur des cas, mettrait sans doute des dizaines d’années à se traduire dans les faits.

De tout temps, les chrétiens se sont souciés des plus faibles, des plus marginalisés, des mendiants. Le préambule de notre Constitution suisse explicite que «la force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres».

Aujourd’hui, pour les familles roms, la vie est devenu extrêmement difficile dans leur pays d’origine. Les quelques soutiens leur parviennent principalement par des associations de bénévoles comme la nôtre.

Interdire la mendicité sans offrir une alternative crédible, c’est mépriser le pauvre, nier son existence et se déresponsabiliser. « Il y aura toujours des indigents dans le pays ; c’est pourquoi je te donne ce commandement : Tu ouvriras ta main à ton frère, au pauvre et à l’indigent dans ton pays » lit-on dans la Bible (Deutéronome 15-11).

Nous devons lutter contre la pauvreté et non contre les pauvres.

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Signer le référendum, c’est exiger une réflexion

Si la demande de référendum aboutit, les responsables politiques disposeront d’un peu plus de temps pour imaginer des mesures d’accompagnement à l’interdiction de la mendicité. En effet, différents démarches parlementaires et extra-parlementaires proposent de compléter cette loi adoptée par une courte majorité au parlement cantonal.

Ainsi, la ville de Lausanne, qui a mis en place il y a quelques années une réglementation de la mendicité (et non pas une interdiction) pourrait faire valoir son expérience auprès des autorités cantonales et inspirer ainsi des mesures complémentaires plus humaines.

Nous sommes à mi-parcours: il ne reste qu’une trentaine de jours pour récolter 12’000 signatures valables avant Noël et nous en sommes très loin. Nous sommes conscients que la mendicité dans nos rues soulèvent un grand nombre de questions : sont-ils exploités ? N’y a-t-il pas un appel d’air ? Ils nous énervent…  Nous partageons volontiers notre expérience de terrain. Nous n’avons bien-entendu pas toutes les réponses, mais nous sommes tout à fait ouverts au débat, aussi sur ces mots qui semblent parfois bien dépassés, comme celui du geste de bonté qu’est l’aumône.