A Cluj, S. Egidio Suisse rencontre l’Eglise gréco-catholique roumaine

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Une délégation de cinq personnes de la communauté de S. Egidio Suisse a eu l’honneur et le plaisir de rencontrer fin juillet Mgr Florentin Crihălmeanu, évêque gréco-catholique de Cluj-Gherla (Transylvanie roumaine). En sa compagnie, nous avons tenté de mieux saisir l’histoire complexe de la Roumanie et de l’Eglise gréco-catholique. Et notamment les vicissitudes de ces 70 dernières années.

Mercredi 31 juillet 2019, Mgr Florentin nous a accueilli à l’Evêché de Cluj-Gherla pour une visite des lieux. Nous avons pu découvrir de très beaux ouvrages bibliques et des incunables tout en discutant de l’histoire gréco-catholique en Roumanie et de la vie de cette Eglise qui comptait près de 1.5 millions de fidèles avant le début de la persécution communiste, en 1948, et qui n’en compte plus aujourd’hui que quelques centaines de milliers.

Dans un français parfait, Mgr Florentin nous a présenté l’Eglise gréco-catholique roumaine, composante orientale de l’Eglise catholique. Elle célèbre selon le rite byzantin et se trouve en communion avec l’évêque de Rome depuis la fin du 17e siècle. De ce fait, elle constitue un pont culturel entre l’univers orthodoxe et l’univers catholique romain. Depuis 300 ans, elle s’attelle à mettre en valeur la beauté et les valeurs des 2 cultures.

Mais, avec l’arrivée au pouvoir du gouvernement communiste, cette Eglise a vécu un long calvaire. En 1948, le gouvernement a provoqué sa dissolution et a contraint ses membres à rejoindre l’Eglise orthodoxe roumaine. Ses lieux de cultes ont été remis à l’Eglise orthodoxe et ses évêques gréco-catholiques, refusant d’intégrer la hiérarchie orthodoxe, ont été emprisonnés. Plusieurs sont morts en détention, notamment dans la sinistre prison de Sighet, et ont été béatifiés récemment par le pape François.

Depuis la chute du régime soviétique, on assiste à une renaissance de l’Eglise gréco-catholique Roumaine. Toutefois, nous avons perçu la blessure de cette histoire et le souci de pouvoir actuel de pouvoir développer un dialogue œcuménique plus concret avec leurs frères et sœurs orthodoxes.

Mgr Florentin et son vicaire, le Père Călin Ioan Bot, nous ont fait visiter le chantier de nouvelle cathédrale gréco-catholique. Cet imposant bâtiment sera dédié aux martyrs gréco-catholiques du communisme. Mgr Florentin tient à ce que la mémoire des martyrs soit œcuménique.

Dans l’après-midi, nous avons eu la chance de pouvoir visiter la paroisse d’un quartier de Cluj. Une paroisse vivante qui accueille de nombreux enfants et qui est fière de son enseignement catéchétique moderne. Elle propose un vestiaire et de la nourriture pour les personnes se trouvant dans une grande précarité.

Enfin, nous avons pu vivre la messe avec les sœurs de la « Mère de Dieu » dans leur monastère de Cluj. Nous avons été portés par des voix célestes et gardons un souvenir ému par l’accueil des sœurs Laeticia et Dominique. La plupart des sœurs âgées de la Congrégation ont vécu la persécution pendant le communisme, ont dû se cacher ou ont été assignées à résidence. Et si nous avions été à leur place, est-ce que nous aurions aussi résisté ou est-ce que nous aurions renié notre foi ?

Le lendemain matin, Mgr Florentin a organisé une entrevue avec Mgr Andrei Andreicuț, métropolite de Cluj, Maramures et Sălaj. Ce dernier nous accueille au séminaire orthodoxe de Cluj, nous en fait découvrir la très belle chapelle et nous fait servir le café dans la salle protocolaire. Une occasion, pour nous, de comprendre en sa compagnie la perception orthodoxe du dialogue œcuménique. Une occasion, pour Mgr Florentin, pour approfondir le lien humain avec son homologue alors que certains sujets de discussion restent très sensibles entre les deux Eglises.

L’échange est cordial et nous espérons que ce moment commun apportera sa pierre à l’édifice au dialogue œcuménique. Nous portons nos frères et sœurs en Christ dans nos prières.

Selon Mgr Florentin, les relations se détendent peu à peu. Du fait de l’intensification des relations avec l’Europe occidentale, les gens deviennent plus ouverts au dialogue entre Eglises. La visite du pape Jean Paul II en Roumanie, en mai 1999, et la rencontre œcuménique à Bucarest en 1998 (organisée par S. Egidio) ont marqué un tournant dans les rapports avec l’orthodoxie.

« Avant, le regard sur les catholiques était terrible. La visite du pape a pacifié les relations, avec des effets positifs au niveau de la hiérarchie. Mais sur le terrain, peu de choses ont réellement changé, mais nous croyons au dialogue »

Cependant, beaucoup d’orthodoxes roumains estiment encore qu’en signant l’acte d’union avec Rome en 1700, les Greco-catholiques leur ont volé leurs églises et que l’Etat communiste avait raison de les dépouiller de leurs cathédrales, de leurs églises, de leurs cimetières, de leurs livres liturgiques et de leurs archives pour les donner à l’Eglise orthodoxe. Le chemin de la réconciliation entre orthodoxes et gréco-catholiques en Roumanie reste long et laborieux.

La petite délégation de S. Egidio est très reconnaissante du temps que lui a consacré Mgr Florentin et pour les nombreux signes d’amitié dont il a témoigné. S. Egidio Lausanne portera dans son cœur la Roumanie et ses Eglises, espérant pouvoir y retourner.